Catherine Lienard
15 févr. 2023
Un peu de géologie:
Il y a environ 30 millions d'années, alors que le climat sur terre était bien plus chaud qu'aujourd'hui, et que l'homme n'était pas encore apparu, la mer Stampienne (Stampien: période de l'oligocène, aujourd'hui appelé Rutélien) s'est retirée en laissant des épaisseurs de sable pouvant varier de 10 à 30 m. Ce sable était recouvert d'une dalle de grès, de sédiments calcaires et de limons éoliens. L'érosion a fracturé les dalles de grès, ce qui a généré les reliefs observés dans la forêt de Fontainebleau, et donné lieu à des meulières dans la région d'Etampes (qui a donné son nom à "stampien").
Un peu d'historique:
En 1870, Hippolyte Taine, écrivain, s'était installé à Barbizon et aimait escalader les rochers.
En 1874 naît le Club Alpin Français. Certains de ses membres découvrent l'intérêt et la magie des blocs de la forêt de Fontainebleau.
A partir de 1908, plusieurs alpinistes, grimpeurs, associations de grimpe, explorent les différents rochers et blocs, créant des voies et des cotations sur de nombreux blocs. La cotation la plus élevée est à ce jour un 8b "Fat Man", un rocher en surplomb au Cuvier, voie crée en 1993 (et vandalisée en 2001).
Et donc, nos grimpeurs bleausards explorent, occupent, résistent, bivouaquent dans la forêt, et, en 1969/1970, la bande à Puck crée un parcours balisé de 25 bosses dans le massif des 3 Pignons (incendié par la Gestapo en 1943, et devenu site classé la même année). La succession des bosses créait un parcours d'entraînement pour les marches d'approche en montagne.
Le tracé a été un peu remanié depuis, du fait de l'érosion, des tempêtes, et des pratiquants de ce parcours. Notamment, on voit apparaître, au fil des années, de plus en plus de traces en dehors du tracé officiel. L'ONF et le COSIROC (créé pour lutter contre la menace de l'urbanisation), aidés de bénévoles, entretiennent (et réparent car là aussi, des vandales saccagent et détruisent) les différents parcours (Denecourt-Colinet, 25 bosses). Et si on l'appelle toujours 25 bosses, il y en a 28 qui sont repérées désignées sur la carte IGN.
Et moi:
J'ai découvert ce circuit lorsque j'ai commencé à réfléchir à mes sorties bivouac en région parisienne. Le souci est que l'accès en transports en communs uniquement est infaisable, sauf à passer une nuit en camping la veille et le soir.
La variante est donc de prendre un taxi/VTC depuis la gare de Fontainebleau, ou, encore plus pratique si on a le permis, de louer une voiture particulière à la gare de Fontainebleau. En ayant expérimenté cette possibilité, j'ai donc découvert que, même si ce massif est à presque 3h de chez moi (métro, train, voiture), il est complètement accessible à la journée. Donc, après les 2 bivouacs (formellement interdits en forêt de Fontainebleau, je le rappelle), je vais pouvoir y retourner régulièrement.
Ce parcours est intéressant à plusieurs titres:
Sur le plan sportif :
Il renforce les groupes musculaires concernés par le trek. Cela devient plus compliqué si on veut s'entraîner avec le gros sac à dos car des passages sont très très étroits (personnes obèses s'abstenir, et a fortiori les sacs obèses). En sachant que, potentiellement, il existe des voies de contournement des passages trop compliqués, escarpés, techniques, étroits.
Pour les traileurs, c'est un vrai terrain de jeu (ou pas?), les voir virevolter de rochers en rochers m'épate et m'encourage à franchir plus gaillardement certains passages, ceux avec un peu de vide notamment. Sinon, on peut commencer à y trottiner en douceur pour travailler le souffle et le cardio.
Avec ses petits pas d'escalade, ou, simplement, avec ses blocs un peu hauts à franchir pour mes petites jambes, où je dois donc me tracter avec les mains, il fait aussi travailler le haut du corps, mes muscles le confirment le lendemain…
Sur le plan plaisir :
Le spectacle et les sensations se succèdent, comme les reliefs et les paysages, alternant entre le doute (oui oui, aussi sur une si petite distance) et l'enthousiasme, entre l'épuisement et l'émerveillement, jusqu'à la satisfaction finale d'avoir encore une fois bouclé ce parcours. Si les perspectives restent similaires (vers la forêt, vers les prochaines bosses ou les villages alentours), l'abord des bosses se renouvelle à chaque passage, et même si des tronçons ont été aménagés, renforcés, sécurisés, le franchissement des derniers blocs sous le sommet me surprend à chaque fois.
Au total:
Je trouve ce parcours nettement plus ludique et intéressant que les sentiers Denecourt (qui ont par contre le mérite d'être accessibles depuis une gare, et sans préparation physique particulière), même si je n'en suis qu'à mes premières sorties, en sens horaire et anti horaire; et le simple fait de passer à une boucle entière à la journée plutôt qu'en 2 jours a donné une autre configuration à ces bosses.
Voilà, je suis fan. Je vais donc affronter ces 25 bosses régulièrement, et à différentes saisons, ce qui va enrichir le spectacle, les sensations, et les émotions. Il y aura sans doute moins de photos au fil des parcours, mais, je l'espère, un intérêt et un plaisir sans cesse renouvelés.